« Fare ga na an’ danpu, an’xa ga na a danpu : xa su ña faru. » (Proverbe soninké du Sénégal, de la Mauritanie, de la Gambie et du Mali)
« Si un âne te donne une ruade et que tu la lui rends : vous devenez tous deux des ânes. » (Proverbe soninké du Sénégal, de la Mauritanie, de la Gambie et du Mali)
« If a donkey gives you a kick and you give it to him: you both become donkeys. » (Soninke proverb of Senegal, Mauritania, Gambia and Mali)
Signification : Si une personne te fait du mal et que tu répliques tu n’es pas meilleur(e) qu’elle. Il est préférable de pardonner.
Source : http://www.soninkara.org
Parallélisme biblique
Les Soninké ont écrit l’une des plus belles pages de l’histoire de continent africain. Ils ont fondé l’empire du Ghana (750-1240). Ils sont aussi connus sous le nom de Sarakolé, Maraka, Wangara , Wakoré, Aswanik ou Toubakaï, mais nous préférons utiliser l’appellation qu’ils préférent : Soninké . Chez les Soninké, comme dans les nombreuses sociétés sub-sahariennes, les ânes sont utilisés pour de nombreuses taches, notamment le transport des produits agricoles, des marchandises et même des êtres humains. Si leur utilité est indéniable, leurs caprices sont aussi légendaires. Par exemple, le comportement de l’âne sur la route est si bizarre qu’au nord du Cameroun les gens l’appellent « ministre du transport » parce qu’il cède difficilement la route aux autres usagers, se moque éperdument des coups de klaxon, et cause parfois des accidents de circulation. Il n’est pas rare qu’un âne donne une ruade à son maitre. Que faut-il faire alors dans ce cas ? Les Sarakolé répondent à cette interrogation avec une bonne dose de sagesse : «Si un âne te donne une ruade et que tu la lui rends : vous devenez tous deux des ânes. » La moralité de ce proverbe est simple : comme la ruade fait partie de la nature même de l’âne, la lui rendre équivaut à se défaire de son humanité pour adopter la nature d’une bête. C’est tout simplement ridicule et inimaginable.
Mais, en réalité, les Sarakolé ne font pas allusion à l’âne au sens littéral du terme. Ils désignent ici tous ceux ou celles qui, par leurs parles ou par leurs actions, offensent leurs prochains. En agissant de la sorte ils ou elles se rabaissent au même niveau que l’âne. Leur rendre le mal, équivaut à se mettre à leur propre niveau et donc à devenir comme un âne. Or, c’est justement ce qu’il faut éviter en remplaçant la rancune et la vengeance par le pardon. En cela les Sarakolé nous rappellent indirectement l’un des plus grands enseignements bibliques.
Le pardon fait partie des recommandations bibliques. La Bible déclare en Proverbes 20 :22 : Ne dis pas: ‘Je me vengerai!’ Confie-toi en l’Eternel et il te délivrera.» (La Bible du Semeur). Dans Colossiens 3 :13 elle précise : « Supportez-vous les uns les autres, et si l’un de vous a quelque chose à reprocher à un autre, pardonnez-vous mutuellement; le Seigneur vous a pardonné: vous aussi, pardonnez-vous de la même manière. » (La Bible du Semeur). C’est frappant de voir que ce texte nous renvoie au pardon que le Seigneur nous a gracieusement accordé. Ceci est aussi un rappel de nos propres péchés. Nous ne sommes que des graciés, refuserions nous de gracier les autres ? Quand le Christ s’est écrié sur la croix : « …Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font …» (Luc 23 :34), personne n’est allé solliciter son pardon, au contraire les gens l’insultaient et se moquaient de lui. Mais il a fait le premier pas. Il a bravé la dureté du cœur et a préféré la voie du pardon à celle de la vengeance. En cela, il a mis en pratique ce que lui-même a enseigné.
Effectivement, pendant son ministère terrestre, Jésus a beaucoup prêché sur le thème du pardon. Le texte de Matthieu 18 :21-35, par exemple donne une grande illustration sur la manière de pardonner. Le pardon, selon le plan de Dieu, n’obéit pas à la logique du « premier avertissement, deuxième avertissement, blâme ». Christ nous invite à pardonner soixante-dix fois, sept fois, c’est-à-dire indéfiniment. Dans Luc 6 :35-42, le Christ recommande aussi d’aimer les ennemis, de leur faire du bien et de pardonner.
Le Seigneur n’est pas arrêté là. Dans Matthieu 6 :14-15, il a clairement souligné que celui ou celle qui refuse de pardonner n’obtiendra pas de pardon non plus : « En effet, si vous pardonnez aux autres leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi. Mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos fautes. » La même vérité est soulignée en Marc 11 :25 en ces termes : « Quand vous priez, si vous avez quoi que ce soit contre quelqu’un, pardonnez-lui, pour que votre Père céleste vous pardonne, lui aussi, vos fautes. » Refuser de pardonner est donc d’un gravité extrême car cela équivaut à couper le pont du pardon divin.
Mais, peut-on objecter, c’est plus facile au Seigneur de pardonner car il est Dieu. N’est-ce pas demander l’impossible à l’homme ? C’est vrai dans une certaine mesure. Se venger est la chose la plus facile du monde. Même le plus faible des êtres humains a une grande capacité nuisance. Mais pardonner n’est pas une tâche facile. Il nécessite beaucoup de volonté, d’humilité et de sacrifice. Parfois, il est difficile de se pardonner soi-même. Cependant le pardon n’est pas impossible. Abraham a eu des démêlés avec son neveu. Il a dû prendre des dispositions pratiques pour qu’ils ne vivent pas en perpétuelle situation conflictuelle, mais il lui a pardonné ce qui pourrait être interprété comme le manque de respect envers l’aîné, surtout quand a il choisi tout le vert pâturage pour lui-même (Genèse 13 :10-11). Mais Abraham lui a pardonné. La preuve c’est qu’il l’a secouru quand il a été amené captif avec tous les autres habitants de sa ville (Genèse 14 :1-24) et a intercédé pour Sodome et Gomorrhe quand ces deux villes étaient sous le coup du jugement divin (Genèse 18). Grâce à cette intercession, Lot et ses deux filles ont eu la vie sauve (Genèse 19). Joseph a pardonné à ses frères qui l’ont vendu la preuve de la sincérité de son pardon est qu’il a pris soin d’eux (Genèse 45 :1-15 et 50 :15-21). Abigaïl, la femme de Nabal, a pardonné à son mari dont la dureté et la méchanceté sont légendaires et qui l’a certainement fait souffrir, au point d’intercéder en faveur de celui-ci quand David était sur le point de le tuer et d’exterminer sa famille au passage (1 Samuel 25 :1-35). Elle n’a pas cherche à profiter de l’occasion pour se venger de son mari et se débarrasser de lui. Etienne était un homme de la même nature que nous, mais il implora le pardon de Dieu en faveur de ses ennemis au moment même où ils étaient en train de lui ôter littéralement la vie. [Mettre les références]. On pourrait multiplier des exemples tant dans la Bible que dans la vie courante, mais ceux-là démontrent à suffisance qu’il est possible de pardonner. Force est aussi de relever que dans chacun des cas, le pardon est accompagné d’actes d’amour et de gentillesse.
Corrie Ten Boom, l’une des championnes du pardon (lire son livre Dieu en enfer pour plus de détails), disait : « Pardonner c’est libérer un prisonnier et vous apercevoir que le prisonnier c’était vous » De ce fait, pardonner c’est non seulement obéir à Dieu mais c’est aussi se faire du bien. Beaucoup de gens souffrent de problèmes de santé liés au refus de pardonner (insomnie, hypertension, ulcères gastrites, arthrite etc.) A ces problèmes physiques s’ajoutent la perturbation de la communion avec Dieu et la rupture du pont du pardon. Or, nous avons tous besoin de ce pont d’autant plus que nul n’est parfait. En refusant de pardonner, on maintient le couteau dans la plaie avec tout ce que cela peut entrainer comme conséquences. Pire, bien souvent certains individus se poignardent eux-mêmes car celui ou celle qui les a offensé ne s’en est même pas rendu compte ou n’avait pas du tout l’intention de leur faire du mal. Cela arrive facilement quand un humour est mal placé ou quand les préjugés déforment la réalité, pour ne citer que ces deux cas. C’est si facile de blesser quelqu’un…
Sans encourager qui que ce soit à faire du mal à son prochain, car c’est contraire à la volonté de Dieu (3 Jean verset 11), nous voulons souligner avec force l’importance du pardon. Pardonner n’est pas un exercice facile, comme nous l’avons relevé plus haut, mais c’est la voie de la guérison et de la libération. Dieu nous encourage à marcher sur cette voie. Mieux encore, il chemine avec tous ceux et celles qui empruntent ce chemin et met à leur disposition la force nécessaire. Tournons-nous vers Dieu, implorons sa force, et il nous aidera. A tous ceux et celles qui ont de la peine à pardonner, nous recommandons vivement la prière. Dieu donne la force de pardonner à quiconque la lui demande sincèrement. Nous encourageons aussi la lecture du livre Dorothée et Samuel Hatzarkortian intitulé Le pardon une puissance qui libère et publié aux éditons compassion. C’est l’un des meilleurs livres sur le pardon. Nous l’avons lu il y a de cela plus de vingt ans et il nous a fait beaucoup de bien.
En somme, pardonner n’est pas facultatif. C’est une nécessité. Le pardon n’est pas un signe de faiblesse ou de lâcheté. Au contraire, il faut faire preuve de beaucoup de force et de courage pour pardonner. Le pardon n’est pas une défaite non plus. C’est plutôt une grande victoire sur la vexation, le ressentiment, la colère, et la soif de vengeance. Un proverbe arabe dit à juste titre: « Le pardon est la plus belle fleur de la victoire. ». Implorons le secours de Dieu et faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour l’acquérir. Le doux parfum de la fleur du pardon nous fera du bien et réjouira au passage ceux et celles qui nous entourent. Par-dessus tout, son odeur sera agréable au Dieu Miséricordieux et Compatissant.
© Copyright, Moussa Bongoyok, 2010.
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