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BAS LES MASQUES!

« Pats n’keɗ ngwoz a gi kayah » (n’gèlègedma mafahai)

« Un soleil qui a tue la femme dans le champ d’aubergine. » (proverbe mafa)

[Littéralement: « Un soleil qui tue la femme dans la case d’aubergine. »]

« A aun that kills the woman in the eggplant farm. » (Mafa proverb)

Signification: C’est un fait invraisemblable. C’est assez proche de la vérité mais complètement faux.

 

Commentaire à la lumière de la Bible

 

           Cette expression proverbiale plonge ses racines dans l’histoire lointaine d’un effort infructueux de masquer un crime passionnel. Tout est parti d’une violence conjugale qui a très mal tourné. Elle s’est soldée par la mort d’une femme des suites de coups que lui infligea son mari. Ce dernier, au lieu de reconnaître son forfait, se hâta plutôt de jeter le corps dans le champ d’aubergine – qui est l’un des domaines privés des femmes en pays mafa – et de clamer haut et fort son innocence tout en prenant le soin de préciser que c’est le soleil qui a tué sa femme pendant qu’elle cultivait. Malheureusement pour lui, les voisins ne tardèrent pas à découvrir la supercherie car, s’il est vrai que l’ardeur du soleil est redoutable en pleine saison sèche (surtout dans la période qui correspond à la fin de la saison sèche et que les Mafa appellent begdza), la température est plutôt clémente en saison pluvieuse. Ce mari fut donc condamné pour crime doublé de mensonge. Et c’est à partir de ce jour que les Mafa utilisent l’expression « le soleil qui a tué la femme dans le champ d’aubergine» pour designer, avec une bonne dose d’ironie, un fait invraisemblable. Elle est plus fréquemment utilisée quand le soleil est particulièrement brûlant.

            Cette parole de sagesse mafa nous rappelle une réalité dont la Bible parle abondamment : la tendance qu’a l’être humain à reconnaître difficilement ses fautes, voire à les rejeter sur les autres. Tout a commencé dans le jardin d’Eden où Adam, confronté par le Dieu Créateur immédiatement après la chute, pointa un doigt accusateur vers Eve. Eve, sans hésiter, accusa plutôt le serpent. Pourtant, chacun d’entre eux avait péché et le jugement divin frappa les trois (cf. Genèse 3).

            Au lieu de tirer des leçons de ce qui est arrivé à nos ancêtres, nous continuons malheureusement à nous livrer au même jeu avec une intensification effroyable. Par conséquent, le même virus moral fait d’énormes ravages dans nos sociétés humaines. Pourtant, tôt ou tard la vérité finira par éclater. Et, même si personne ne parvenait à découvrir la réalité ici bas, que ferons-nous devant le Seigneur qui connaît parfaitement le cœur humain et ses multiples masques ?

           Au lieu de tomber dans le piège du mensonge, du reniement, de fausses accusations, et de la supercherie sous ses multiples facettes, il vaut mieux avoir le courage et l’honnêteté de reconnaître sa faute ou sa part de responsabilité. La voie de la paix intérieure, du pardon et de la réconciliation avec Dieu et avec les prochains passe par là.

Moussa Bongoyok

© Copyright by Moussa Bongoyok, 2015

LA BONTE BRISE LES CHAINES DE LA MECHANCETE

“Ba kar ki loué nvou be bele nding.”  (proverbe ewondo)

“On n’appelle pas le chien avec le fouet.” (proverb ewondo)

“One does not call a dog with a whip.” (Ewondo proverb)

Signification: On ne peut pas prétendre vouloir rassembler et réconcilier quand on fait preuve de méchanceté.

 (Proverbe recueilli par le Dr BECHE Emmanuel pour le compte de l’Institut Universitaire de Développement International/ Université Francophone de Développement International)

 

Parallélisme biblique

Décidemment, la forêt dense du pays ewondo recouvre un immense réservoir de sagesse. Les contes et les proverbes qui proviennent de cette région du Cameroun en sont des preuves éclatantes. Le proverbe qui nous intéresse présentement est particulièrement brillant : « On n’appelle pas le chien avec le fouet. »

L’image du chien utilisée ici est très révélatrice car cet animal occupe une place de choix parmi les animaux domestiques. On dirait même qu’il en est le roi. La preuve en est que le chien porte un nom et pas n’importe lequel. Certains chiens portent carrément les noms ou les titres des êtres humains, ce qui traduit leur importance aux yeux de leurs maîtres. Les chiens accompagnent les êtres humains dans nombre de leurs activités. Ils jouent plusieurs rôles fort utiles. Ils gardent  la maison, participent à la chasse, assurent dans une certaine mesure la sécurité des biens et des personnes, assistent les bergers, pour ne citer que cela. Certains chiens bien dressés servent fidèlement au niveau de la police, de la douane, de l’armée et même des centres de santé. Il n’est donc pas étonnant que le chien ait conquis le cœur de nombreuses personnes, jeunes et moins jeunes.

Mais, le chien peut aussi être méchant, voire cruel. Seulement, quel que soit la méchanceté du chien, à moins qu’il ne soit enragé ou engagé dans une lutte féroce avec un autre chien au moment ou quelqu’un d’autre essaie de s’interposer, il attaque rarement son maître.  Qu’est-ce qui explique une telle loyauté ? Je suppose que l’attention et les nombreux gestes de bonté dont il bénéficie y sont pour quelque chose. C’est là où cet adage devient plus intéressant et livre sa quintessence: la bonté brise l’élan de la méchanceté.

A l’heure où nous écrivons ces lignes, nos pensées s’envolent vers la République Centrafricaine et de nombreux autres pays à travers le monde qui traversent des situations on ne peut plus difficiles du fait que certains individus soient devenus une meute de chiens méchants prêts à dévorer des innocents. En dehors de la prière et des interventions des pays amis, que pouvons-nous faire pour arrêter le mal et prévenir les risques d’aggravation si rien n’est fait dans l’immédiat pour briser les liens de la méchanceté ? Il n’y a pas de formule magique. Cependant, si chacun cessait de lever un doigt accusateur vers les autres pour rentrer en soi-même, reconnaître ses propres défaillances (en son âme et conscience), et laisser Dieu brûler les racines de la méchanceté par le doux feu de son amour, la paix reviendrait. Nous assisterions donc à ce que le psaume 85 :10 décrit en de termes fort évocateurs : « Oui, son salut est près de ceux qui le craignent, Afin que la gloire habite dans notre pays. La bonté et la fidélité se rencontrent, La justice et la paix s’embrassent; La fidélité germe de la terre, Et la justice regarde du haut des cieux. L’Éternel aussi accordera le bonheur, Et notre terre donnera ses fruits. La justice marchera devant lui, Et imprimera ses pas sur le chemin (Version Louis Segond). »

Dieu est riche en bonté (cf. Exode 34 :6-7 ; Esaïe 54 :10 ; Lamentations 3 :22, Michée 7 :18). Ceux qui le craignent et qui veulent vraiment l’honorer doivent aussi faire preuve de bonté. C’est d’ailleurs sa volonté à l’égard de ses créatures et surtout des croyants (Michée 6 :8 ; 1 Corinthiens 13 :4 ;  Galates 5 :22, Colossiens 3 :12). Le Dieu qui aida Joseph à être bon envers ses frères qui l’ont pourtant vendu et qui donna à David la force morale de faire preuve de bonté envers le roi Saül (et sa famille) même quand celui-ci a tenté plusieurs fois de l’éliminer physiquement est « le même hier aujourd’hui et éternellement (Hébreux 13 :8).» Puisons en lui la force nécessaire pour manifester la bonté qui brise les chaînes de la méchanceté, car, ne l’oublions jamais, « on n’appelle pas un chien avec le fouet ».

Copyright © by Moussa Bongoyok, 2014.

PARDONNER EST UNE NÉCESSITÉ

« Fare ga na an’ danpu, an’xa ga na a danpu : xa su ña faru. » (Proverbe soninké du Sénégal, de la Mauritanie, de la Gambie et du Mali)

« Si un âne te donne une ruade et que tu la lui rends : vous devenez tous deux des ânes. » (Proverbe soninké du Sénégal, de la Mauritanie, de la Gambie et du Mali)


« If a donkey gives you a kick and you give it to him: you both become donkeys. » (Soninke proverb of Senegal, Mauritania, Gambia and Mali)

Signification : Si une personne te fait du mal et que tu répliques tu n’es pas meilleur(e) qu’elle. Il est préférable de pardonner.

Source : http://www.soninkara.org

Parallélisme biblique

Les Soninké  ont écrit l’une des plus belles pages de l’histoire de continent africain. Ils ont fondé l’empire du Ghana (750-1240). Ils sont aussi connus sous le nom de Sarakolé, Maraka, Wangara , Wakoré, Aswanik ou Toubakaï, mais nous préférons utiliser l’appellation qu’ils préférent : Soninké . Chez les Soninké, comme dans les nombreuses sociétés sub-sahariennes, les ânes sont utilisés pour de nombreuses taches, notamment le transport des produits agricoles, des marchandises et même des êtres humains. Si leur utilité est indéniable, leurs caprices sont aussi légendaires. Par exemple, le comportement de l’âne sur la route est si bizarre qu’au nord du Cameroun les gens l’appellent « ministre du transport » parce qu’il cède difficilement la route aux autres usagers, se moque éperdument des coups de klaxon, et cause parfois des accidents de circulation.  Il n’est pas rare qu’un âne donne une ruade à son maitre. Que faut-il faire alors dans ce cas ? Les Sarakolé répondent à cette interrogation avec une bonne dose de sagesse : «Si un âne te donne une ruade et que tu la lui rends : vous devenez tous deux des ânes. »  La moralité de ce proverbe est simple : comme la ruade fait partie de la nature même de l’âne, la lui rendre équivaut à se défaire de son humanité pour adopter la nature d’une bête. C’est tout simplement ridicule et inimaginable.

Mais, en réalité, les Sarakolé ne font pas allusion à l’âne au sens littéral du terme. Ils désignent ici  tous ceux ou celles qui, par leurs parles ou par leurs actions, offensent leurs prochains. En agissant de la sorte ils ou elles se rabaissent au même niveau que l’âne. Leur rendre le mal, équivaut à se mettre à leur propre niveau et donc à devenir comme un âne. Or,  c’est justement ce qu’il faut éviter en remplaçant la rancune et la vengeance par le pardon. En cela les Sarakolé nous rappellent indirectement l’un des plus grands enseignements bibliques.

Le pardon fait partie des recommandations bibliques. La Bible déclare en Proverbes 20 :22 : Ne dis pas: ‘Je me vengerai!’  Confie-toi en l’Eternel et il te délivrera.» (La Bible du Semeur). Dans Colossiens 3 :13 elle précise : « Supportez-vous les uns les autres, et si l’un de vous a quelque chose à reprocher à un autre, pardonnez-vous mutuellement; le Seigneur vous a pardonné: vous aussi, pardonnez-vous de la même manière. » (La Bible du Semeur). C’est frappant de voir que ce texte nous renvoie au pardon que le Seigneur nous a gracieusement accordé.  Ceci est aussi un rappel de nos propres péchés. Nous ne sommes que des graciés, refuserions nous de gracier les autres ? Quand le Christ s’est écrié sur la croix : « …Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font …» (Luc 23 :34), personne n’est allé solliciter son pardon, au contraire les gens l’insultaient et se moquaient  de lui. Mais il a fait le premier pas. Il a bravé la dureté du cœur et a préféré la voie du pardon à celle de la vengeance. En cela, il a mis en pratique ce que lui-même a enseigné.

Effectivement, pendant son ministère terrestre, Jésus a beaucoup prêché sur le thème du pardon. Le texte de Matthieu 18 :21-35, par exemple donne une grande illustration sur la manière de pardonner. Le pardon, selon le plan de Dieu, n’obéit pas à la logique du « premier avertissement, deuxième avertissement, blâme ». Christ nous invite à pardonner soixante-dix fois, sept fois, c’est-à-dire indéfiniment.  Dans  Luc 6 :35-42, le Christ recommande aussi d’aimer les ennemis, de leur faire du bien et de pardonner.

Le Seigneur n’est pas arrêté là. Dans Matthieu 6 :14-15, il a clairement souligné que celui ou celle qui refuse de pardonner n’obtiendra pas de pardon non plus : « En effet, si vous pardonnez aux autres leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi. Mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos fautes. »  La même vérité est soulignée en Marc 11 :25 en ces termes : « Quand vous priez, si vous avez quoi que ce soit contre quelqu’un, pardonnez-lui, pour que votre Père céleste vous pardonne, lui aussi, vos fautes. » Refuser de pardonner est donc d’un gravité extrême car cela équivaut à couper le pont du pardon divin.

Mais, peut-on objecter, c’est plus facile au Seigneur de pardonner car il est Dieu. N’est-ce pas demander l’impossible à l’homme ? C’est vrai dans une certaine mesure. Se venger est la chose la plus facile du monde. Même le plus faible des êtres humains a une grande capacité nuisance. Mais pardonner n’est pas  une tâche facile. Il nécessite beaucoup de volonté, d’humilité et de sacrifice. Parfois, il est difficile de se pardonner soi-même. Cependant le pardon n’est pas impossible. Abraham a eu des démêlés avec son neveu. Il a dû prendre des dispositions pratiques pour qu’ils ne vivent pas en perpétuelle situation conflictuelle, mais il lui a pardonné ce qui pourrait être interprété comme le manque de respect envers l’aîné, surtout quand a il choisi tout le vert pâturage pour lui-même (Genèse 13 :10-11).  Mais Abraham lui a pardonné. La preuve c’est qu’il l’a secouru quand il a été amené captif avec tous les autres habitants de sa ville (Genèse 14 :1-24) et a intercédé pour Sodome et Gomorrhe quand ces deux villes étaient sous le coup du jugement divin (Genèse 18). Grâce à cette intercession, Lot et ses deux filles ont eu la vie sauve (Genèse 19). Joseph a pardonné à ses frères qui l’ont vendu la preuve de la sincérité de son pardon est qu’il a pris soin d’eux (Genèse 45 :1-15 et 50 :15-21). Abigaïl, la femme de Nabal, a pardonné à son mari  dont la dureté et la méchanceté sont légendaires et qui l’a certainement fait souffrir, au point d’intercéder en faveur de celui-ci quand David était sur le point de le tuer et d’exterminer sa famille au passage (1 Samuel 25 :1-35). Elle n’a pas cherche à profiter de l’occasion pour se venger de son  mari et se débarrasser de lui. Etienne était un homme de la même nature que nous, mais il implora le pardon de Dieu en faveur de ses ennemis au moment même où ils étaient en train de lui ôter littéralement la vie. [Mettre les références]. On pourrait multiplier des exemples tant dans la Bible que dans la vie courante, mais ceux-là démontrent à suffisance qu’il est possible de pardonner. Force est aussi de relever que dans chacun des cas, le pardon est accompagné d’actes d’amour et de gentillesse.

Corrie Ten Boom, l’une des championnes du pardon (lire son livre Dieu en enfer pour plus de détails), disait : « Pardonner c’est libérer un prisonnier et vous apercevoir que le prisonnier c’était vous » De ce fait, pardonner c’est non seulement obéir à Dieu mais c’est aussi  se faire du bien. Beaucoup de gens souffrent de problèmes de santé liés au refus de pardonner (insomnie, hypertension, ulcères gastrites, arthrite etc.) A ces problèmes physiques s’ajoutent la perturbation de la communion avec Dieu et la rupture du pont du pardon. Or, nous avons tous besoin de ce pont d’autant plus que  nul n’est parfait. En refusant de pardonner, on maintient le couteau dans la plaie avec tout ce que cela peut entrainer comme conséquences. Pire,  bien souvent certains individus se poignardent eux-mêmes car celui ou celle qui les a offensé ne s’en est même pas rendu compte ou n’avait pas du tout l’intention de leur faire du mal. Cela arrive facilement quand un humour est mal placé ou quand les préjugés déforment la réalité, pour ne citer que ces deux cas. C’est si facile de blesser quelqu’un…

Sans encourager qui que ce soit à faire du mal à son prochain, car c’est contraire à la volonté de Dieu (3 Jean verset 11), nous voulons souligner avec force l’importance du pardon. Pardonner n’est pas un exercice facile, comme nous l’avons relevé plus haut, mais c’est la voie de la guérison et de la libération. Dieu nous encourage à marcher sur cette voie. Mieux encore, il chemine avec tous ceux et celles qui empruntent ce chemin et met à leur disposition la force nécessaire. Tournons-nous vers Dieu, implorons sa force, et il nous aidera. A tous ceux et celles qui ont de la peine à pardonner, nous recommandons vivement la prière.  Dieu donne la force de pardonner à quiconque la lui demande sincèrement. Nous encourageons aussi la lecture du livre Dorothée et Samuel Hatzarkortian intitulé Le pardon une puissance qui libère et publié aux  éditons compassion. C’est l’un des meilleurs livres sur le pardon. Nous l’avons lu il y a de cela plus de vingt ans et il nous a fait beaucoup de bien.

En somme, pardonner n’est pas facultatif. C’est une nécessité. Le pardon n’est pas un signe de faiblesse ou de lâcheté. Au contraire, il faut faire preuve de beaucoup de force et de courage pour pardonner. Le pardon n’est pas une défaite non plus. C’est plutôt une grande victoire sur la vexation, le ressentiment, la colère, et la soif de vengeance. Un proverbe arabe dit à juste titre: « Le pardon est la plus belle fleur de la victoire. ». Implorons le secours de Dieu et faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour l’acquérir. Le doux parfum de la fleur du pardon nous fera du bien et réjouira au passage ceux et celles qui nous entourent. Par-dessus tout, son odeur sera agréable au Dieu Miséricordieux et  Compatissant.

© Copyright, Moussa Bongoyok, 2010.

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